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La société de consommation française durant les Trente Glorieuses


https://unphilosophe.wordpress.com/2015/06/22/les-accumulations-critique-de-la-societe-de-consommation/ : « 99 cents », Andreas Gursky

Comment s’est développée la société de consommation française pendant les Trente Glorieuses? Quels étaient les facteurs favorable à son expansion, ses conséquences et ses limites ?

Introduction

    Le terme de “Trente glorieuses” apparu pour la première fois dans le titre d’une étude publiée en 1979 par l’économiste Jean Fourastié, expression faisant référence aux         « Trois Glorieuses » de la révolution de 1830. Ce terme définit une période de croissance économique ayant été la plus longue et la plus rapide de nos jours qui a duré de la fin de la guerre au début des années 1970 et était caractérisée par une véritable société de consommation.                                                                                                                                               Après la Seconde Guerre Mondiale, l’Europe en partie détruite par les conflits militaires doit se reconstruire. Dans le besoin financier après avoir mené une économie de guerre, les pays européens adoptent des politiques adaptées. Estimant le protectionnisme comme l’une des causes de la guerre, les États-Unis, devenus une puissance incontestable, veulent reconstruire l’économie mondiale. Ainsi, ils imposent un nouveau système monétaire lors de la conférence de Bretton Woods en juillet 1944. En décembre 1945, le FMI est fondé. En juin 1947, le plan Marshall est établi par les États-Unis. Enfin, le 30 octobre 1947, les accords du GATT sont signés. Ces différents accords déterminerons l’avenir d’une Europe occidentale en pleine mutation, en pleine entrée dans la société de consommation et dans une croissance économique et sociale sans précédent que connaîtra plus particulièrement la France.                                                                                                                        Nous nous demanderons alors comment s’est développée la société de consommation française lors des “Trente glorieuses”. Premièrement, nous expliquerons la fondation de cette société, ensuite, nous nous intéresserons aux facteurs favorables à son expansion d’un point de vue économique, social et politique. Enfin, nous verrons quelles sont les conséquences et les limites de cette société.                                                                                          Ce sujet répond au thème “Crise et progrès” proposé par l’éducation nationale, en s’appuyant sur les deux matières suivantes: Histoire et Sciences Économiques et Sociales.

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Harry Dexter Whit (à gauche), (économiste américain) et John Maynard Keynes (à droite) (économiste britannique) sont deux personnages importants de la conférence de Breton Woods. [Photographie prise durant la conférence de Breton Woods]

I. Comment la société de consommation a été fondée ?

Définition globale

   Apparue dès la seconde moitié du XIXème aux États-Unis, en pleine phase d’industrialisation, elle commence par la création de nouvelles méthodes de travail à la chaîne (Organisation Scientifique du Travail) avec le Fordisme et le Taylorisme. En effet, ce renouvellement du travail permet aux entreprises de produire massivement et en peu de temps. Ainsi, la production des biens est assez importante pour satisfaire les besoins des consommateurs de plus en plus nombreux.                                                                                            Ce type de société répond en fait à une logique particulière, reprenant les principes du capitalisme dont elle est issue. Elle consiste à satisfaire les consommateurs en leur vendant des biens et des services primaires (nourriture, logement, santé…)  et secondaires (loisirs, conforts…) pour leur plaisir ou pour se démarquer (consommation ostentatoire). Les recettes générées par la vente de ses biens et services permettront d’enrichir les industries qui pourront augmenter leur production en élevant les salaires, en embauchant et en investissant dans des moyens plus performants. Les salariés avant tout consommateurs, pourront donc bénéficier d’un pouvoir d’achat plus élevé et consommeront davantage. La demande sera en hausse et la production devra être plus importante : c’est le cercle vertueux.                                                                                                      La société de consommation est donc une société où le pouvoir d’achat est assez important et permet  la consommation de biens et de services en quantité de plus en plus importante,  pour satisfaire les besoins des consommateurs.

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Photo de 1913 représentant une usine Ford organisée selon le fordisme/taylorisme (ou O.S.T).
Cette usine se trouvait dans le Michigan (Etats-Unis) et avait réussi à faire baisser le temps de production d’une voiture de 12h à 1h33.

 Des États-Unis à l’Europe

   La société de consommation, à la base américaine, a été mise en place en Europe après la Seconde Guerre Mondiale grâce à la fin de la politique de protectionnisme des USA. En effet, les États-Unis veulent reconstruire l’économie mondiale pour la rendre plus stable et plus durable, en partie grâce aux accords de Bretton Woods (juillet 1944). Ils veulent en réalité jouer un rôle important voir majeur dans ce nouveau système économique en faisant du dollar une monnaie internationale de référence, directement basée sur l’or.     De plus, les accords du GATT (octobre 1947) permettent de faciliter le libre-échange en réduisant les tarifs douaniers et le Plan Marshall incite les pays sinistrés à adopter le modèle américain.                                                                                                                                        S’ajoute à cela la création de la CEE (Communauté Economique Européenne). La CEE (aujourd’hui l’Union Européenne), est fondée en 1957 par le Traité de Rome entre l’Allemagne de l’OUEST (ou RFA), la Belgique, la France, l’Italie, le Luxembourg et les Pays-Bas.                                                                                                                                                          La CEE a permis l’établissement d’un marché commun entre tous ces pays ainsi que d’une politique de libre-échange, posant les bases d’une société fondée sur la consommation. Certaine politique appliquée en CEE vise aussi à aider les pays tout en imposant indirectement un nouveau système basé sur la consommation de masse, tel que la Politique Agricole Commune qui vise à moderniser et à aider financièrement le secteur agricole.                                                                                                                                                              Enfin, l’émergence des Firmes Multinationales (terme apparu dans les années 1960) a également participé au développement de la société de consommation américaine en Europe, grâce à leurs filiales. En effet, des entreprises américaines comme Coca-Cola, Mc Donald’s, Marlboro ou encore Ford pour l’automobile, s’établissent en Europe et proposent leurs biens à grande échelle grâce à leurs chaînes de production et à leurs filiales. Plusieurs pays d’Europe bénéficient de cette croissance, à un degré différent, tel que la Grande-Bretagne (2.7% de croissance annuel), la RFA (5.1%), l’Italie (5.5%), ainsi que la France (5%).

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Deux pubs des entreprises Malboro et Ford dans les années 1960.

Établissement en France

   La société de consommation s’installe en France dès la fin de la guerre car tout reste à reconstruire. En effet, l’argent apportée par le Plan Marshall (5 juin 1947) incite la France à imiter le modèle américain.                                                                                                                          Le premier grand facteur du développement de la société de consommation sur le territoire français fut la création de l’état providence en 1941, ayant permis à toute la population de participer à la consommation de masse.
Le second facteur fut la création du plan Monnet-Hinsh. Ce plan proposé par Jean Monnet, à la fin de la Seconde Guerre Mondiale, est un plan de reconstruction basé sur l’exploitation des zones de production de charbon et d’acier en RFA, l’objectif étant de ramener la France à 150% de la production industrielle d’avant guerre tout en privilégiant la croissance des secteurs indispensables à la reconstruction de la France.                                  Enfin, le dernier grand facteur est la modernisation de l’industrie, en effet, depuis 1950, l’industrie s’est modernisée et est devenue plus performante grâce à une mécanisation des moyens de production ainsi que du travail à la chaîne ce qui a permis aux entreprises de produire davantage et d’augmenter ventes et bénéfices. En effet, selon les principes de l’OST (Organisation Scientifique du Travail) avec le Fordisme, le Taylorisme ou encore le Toyotisme, les moyens de production se doivent d’être optimisés pour pouvoir produire le plus possible, en peu de temps et à moindre coût.
Bien sûr, les entreprises ont un impact direct sur la population, en effet, grâce au Plan Marshall et à leur gain de productivité, les entreprises investissent davantage et plus régulièrement ce qui crée de nouveaux emplois et aide les ménages français. La création massive de nouveaux emplois va permettre aux ménages de rentrer dans une consommation de masse, en partie grâce au « compromis fordiste ». Les employeurs doivent distribuer des salaires d’un niveau suffisant afin que les salariés puissent consommer la production des entreprises : les salaires créent ainsi un débouché à la production. Ainsi, l’industrie devient un acteur primordial dans l’établissement de la société de consommation en France.

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Affiche allemande en faveur du plan Marshall datant du début des années 1950. Les divers drapeaux formant la voile du bateau sont les différents pays qui ont reçu de l’argent grâce au à ce plan américain.

II. Quels sont les facteurs favorables ?

Facteurs économiques

   Durant la période des Trente Glorieuses, les trois grands secteurs d’activités  (Primaire, Secondaire et Tertiaire) connaissent une forte croissance et permettent de soutenir la société de consommation.

   Tout d’abord, le secteur primaire, représentant 25% des actifs en 1958 (aujourd’hui à moins de 5%). Ce secteur est aidé par la Communauté Économique Européenne dans le cadre de la PAC (Politique Agricole Commune) entré en vigueur en 1962. Cette politique vise à développer et moderniser l’agriculture par un meilleur contrôle des prix et par la distribution de subventions concernant, comme son nom l’indique, l’ensemble des pays de la CEE. La mécanisation devient alors le mot d’ordre de cette nouvelle agriculture où de grandes exploitations voient désormais le jour, au service d’industrie transformant les produits agricoles en diverses produits dérivés destinés à la consommation : l’industrie agro-alimentaire.                                                                                                                                              La production agricole est alors multipliée par 6 et le taux de croissance moyen annuel de cette production est alors de 6.3% sur la période 1950-1973.

   Ensuite, le secteur secondaire, représentant 40% des actifs en 1968, est en pleine essort, en effet, grâce à la forte productivité du travail à la chaîne (Fordisme, Taylorisme, Toyotisme) et à la modernisation des moyens de production, les profits de l’industrie augmentent rapidement. Ainsi, à partir de 1966, avec l’arrivée de firmes américaines, les entreprises françaises qui étaient alors environ 6 fois plus petites que les entreprises américaines vont se développer et s’agrandir en grandes firmes ou en devenant des filiales de grands groupes industriels.                                                                                                            L’innovation devient alors la priorité des entreprises, notamment dans le domaine de l’aviation, de l’automobile, des matériaux, et des télécommunications (mis au point de nouvelles matières comme le plastique à base de pétrole, nouvelles voitures avec davantage d’options et de sécurité, amélioration des téléphones et téléviseurs, installation des premiers ordinateurs scientifiques, nouveaux avions à réacteurs…).                                     Avec l’augmentation de la population, le domaine du bâtiment est aussi en pleine expansion. En effet la construction de logement en 1975 est dix fois plus importante qu’en 1946.                                                                                                                                                                       La démocratisation de la voiture est aussi la cause du développement important de la métallurgie, de la sidérurgie et de l’industrie pétrolière (utilisée aussi pour les matières plastiques et textiles synthétiques).                                                                                                  L’immigration a également joué un rôle important dans l’essor de l’industrie (notamment dans le bâtiment et l’automobile) en offrant de la main d’oeuvre pour répondre à une société de consommation toujours plus gourmande. En effet, en plus des profits d’effectif liés à un exode rural sur le territoire français, les populations principalement maghrébines mais aussi espagnols, portugaises, italiennes ou encore yougoslaves fuyant les guerres de décolonisation ou les dictatures ont permis de renforcer la productivité des chaînes de production.                                                                                                                                                       La croissance industrielle permet alors l’enrichissement du pays. Le PIB français atteint les 5% durant la période 1950-1973 et le taux de croissance moyen annuel de l’industrie est environ de 5% dans une période de plein emploi où le chômage ne dépasse pas les 3%. Aussi, les salaires augmentent régulièrement et entraînent une élévation du pouvoir d’achat. Par conséquent, la France connaît une forte croissance économique de 5% par an contre 1.15% entre 1913 et 1950 et 2,10% entre 1973 et 2000 (en moyenne), facteur indispensable pour la société de consommation.

   Enfin, le secteur tertiaire, représentant 45% des actifs en 1968, soit la majorité (secteur primaire étant à 15%).                                                                                                                                       La croissance industrielle s’accompagne inévitablement du développement des services liés à la consommation. C’est ainsi que les premiers supermarchés ouvrent leur porte pour vendre des milliers de produits destinés à toute la population. Ces produits d’ailleurs très diversifiés et ayant une durée de vie limité permettent un renouvellement continuel de la consommation et du cycle de production (on parle de l’obsolescence programmée).                De plus, pour mettre en avant leur production, les entreprises ont recours à des agences publicitaires et à des stratégies marketing. Qui veut dire publicité, veut aussi dire envie de consommer pour les ménages qui n’hésitent pas à emprunter auprès des banques, des services de crédits, ou à assurer leurs biens.                                                                                              Aussi, l’essor de l’industrie automobile se traduit par un développement des transports et permet le développement du tourisme dans des régions plus éloignées, tandis que les innovations dans l’industrie de pointe entraîne le développement des services de télécommunications.

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Diagrammes représentant la part des secteurs d’activités Français en 1946, 1962 et 1968. On remarque alors la nette baisse du secteur primaire et la hausse du secteur secondaire puis à la fin des Trente Glorieuses, la hausse du secteur tertiaire.

 

Taux de croissance du PIB (France/Etats-Unis) de 1950 à 1990
% 1950-1973 1973-1979 1979-1990
PIB (France) 5.0 2.8 2.2
PIB (Etats-Unis) 3.6 2.6 2.6
On remarque nettement la période de pleine croissance durant les 30 Glorieuses (5.0% de PIB, dépassant même celui des USA) puis la constante baisse jusque dans les années 1990.

 

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Photo prise en 1960, à l’occasion de l’ouverture du premier Supermarché Casino de France, à Grenoble.

Facteurs Sociaux

   Dès l’après guerre, les ménages optent pour un mode de vie basé sur la consommation. En effet, les personnes ayant subi les horreurs de la Seconde Guerre Mondiale souhaitent vivre et profiter de la vie.
C’est ainsi que grâce aux hausses de salaire, leur pouvoir d’achat augmente et leur permet d’acheter des biens et des services pour satisfaire leurs besoins. Ce nouveau mode de vie entraîne alors la création de la classe moyenne, regroupant les ménages profitant d’un pouvoir d’achat assez élevé pour acheter des biens fabriqués à grande échelle à des prix accessibles.                                                                                                                                                    Pour satisfaire la demande en hausse, de nombreuses grandes enseignes permettent la vente d’équipements ménagers (télévisions, réfrigérateurs, machines à laver… dans les années 1960). Ainsi, le taux d’équipement des ménages dépasse les 70% et peu après les 90%.                                                                                                                                                             L’apparition de véritables salles de bains et de cuisines participe à l’amélioration des conditions de vie, ainsi qu’à l’allongement de l’espérance de vie à 69 ans pour les hommes et 77 ans pour les femmes en 1976. Durant cette période, la mortalité va énormément diminuer (1976 à 10.5 %).                                                                                                                                 Aussi, l’élévation générale du niveau de vie provoque un sentiment de satisfaction dans l’ensemble du pays et entraîne une élévation soudaine du taux de natalité supérieur à 20% pendant la période des Trente Glorieuses, c’est le “ Baby-Boom “. Entre 1958 et 1973, la population française passe de 45 à 52 millions d’habitants. Ce phénomène démographique permettra l’augmentation de la consommation et le rajeunissement de la population active dont pourront profiter les secteurs d’activités.                                                                         La diminution des heures de travail (40 h par semaine en 1945, 39 h en 1982, 35 h en 1998) et le développement des congés payés permet aux ménages de profiter des loisirs et de partir en vacances dans de nouvelles stations balnéaires. Le développement important de l’automobile à grande échelle dans les années 1950 permet aux ménages d’acheter plus facilement une voiture, symbole de liberté et entraîne la modernisation et l’agrandissement du réseau routier pour faciliter les transports.                                                     De plus, le développement de la publicité participe à la promotion de la grande distribution et incite les ménages à consommer davantage. Influencés par cette publicité, ils vont tomber dans la consommation de masse et n’hésitent pas à emprunter auprès des banques, ce qui stimule l’économie française. La consommation des ménages est ainsi multipliée par 2.7, accompagnée d’une hausse annuelle moyenne de 4%.                                     Par conséquent, une attitude d’imitation sociale se développe rapidement pour les individus ayant envie de montrer leur appartenance à un groupe social par le biais de la consommation. Ainsi, la mode prend une place de plus en plus importante dans la vie quotidienne, particulièrement pour les femmes, avec l’ouverture de nouvelles enseignes vestimentaires et de produits cosmétiques.                                                                                             Enfin, dû à un secteur industriel particulièrement développé, le pouvoir syndical se renforce du côté des ouvriers et met en avant une certaine cohésion sociale permettant l’amélioration des conditions de travail, indispensable pour améliorer la productivité et pour répondre à la consommation en hausse.

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Photo prise en mars 1946, en pleine période du “Baby-Boom”

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Photo prise dans le début des années 60 (date précise non connue) représentant une queue de voiture à l’approche des vacances d’été. Cette photo représente assez bien la liberté apportée par la voiture et par les congés payés.

Facteurs politiques

   De nombreuses réformes ayant lieu durant les “Trente glorieuses” ont permis la reconstruction et le développement de l’économie française, réformes indispensables pour la société de consommation.                                                                                                               En effet, dès l’après guerre, De Gaulle, avec le Gouvernement Provisoire de la République Française (1944-1946), encourage, en plus d’une politique de planification, la nationalisation des entreprises et du secteur bancaire (Renault, EDF, GDF, Banque de France et principales banques privées…) et une consommation basée sur des produits français tels que le charbon français, des automobiles françaises (Renault, Peugeot), les premiers équipements domestiques fabriqués en france etc… Cette politique sera à son apogée pendant la présidence de De Gaulle (1958-1969) et persistera sous le gouvernement de G. Pompidou (1969-1974).                                                                                                                       L’Etat cherche en effet à développer les entreprises tout en renforçant son rôle et son pouvoir dans l’économie et la société du pays. Il devient un agent économique de premier plan, intervient dans tous les secteurs d’activités et renforce la protection sociale des salariés (SMIG, la sécurité sociale, le développement des congés payés…). C’est le principe de “l’Etat providence” selon l’expression d’Emile Ollivier, député républicain du XIXème siècle.                                                                                                                                                           Cependant, pour éviter un ralentissement de la production française, il est indispensable d’ouvrir la France aux marchés internationaux. C’est pourquoi une économie de marché est mise en place par De Gaulle, avec l’élaboration des premières baisses tarifaires prévues par la CEE.                                                                                                                                                             La création du “nouveau franc” en 1960 par Antoine Pinay, Ministre de l’économie sous De Gaulle, permet la consolidation de la monnaie française, pour éviter l’inflation et préserver la valeur du franc, après une période de difficulté et en vue de la croissance économique forte.                                                                                                                                         De plus, la modernisation du secteur industriel et agricole sera une des priorités de la politique de De Gaulle et de Pompidou afin d’augmenter les rendements. Cette modernisation se retrouvera d’ailleurs dans le quotidien des français, où les ménages pourront profiter des dernières innovations en matière d’aménagement.                                   Enfin, concernant la politique migratoire française, dès 1945, l’Office National de l’Immigration (ONI) est crée pour gérer le recrutement des travailleurs étrangers qui allaient participer à la reconstruction économique du pays en offrant leurs compétences dans les différents secteurs d’activités.

III. Quelles sont les limites et les conséquences ?

Point de vue économique

   Cependant, cette période de pleine consommation sera freinée par un contexte international tendu (Guerre du Vietnam,   Guerre Froide). Ce qui engendrera une hausse du prix des matières premières donc une hausse des prix (tous types confondus). Le consommateur va donc se résigner à acheter, on assiste donc à une baisse de consommation.                                                                                                                                                   De surcroît, le prix du pétrole (élément important des Trente Glorieuses)  va augmenter en raison de l’embargo provoqué par les pays arabes le 16 et 17 octobre 1973 durant la guerre du Kippour. Le but étant de réduire et de réguler l’apport en pétrole aux pays soutenant Israël (le cas de la France). La société de consommation française étant énormément basée sur l’utilisation du pétrole arabe, elle en est très vite devenue dépendante, par conséquent, le prix du pétrole va énormément augmenter, ce qui va freiner la consommation des usagers français. Cette crise, touche avant tout le secteur secondaire, qui utilise énormément le pétrole dans la production.                                                                                             De plus, les entreprises du secteur secondaire, au cours de la fin des Trente Glorieuses, subissent un autre problème, qui est la sous compétitivité. En effet, on remarque que les petites entreprises ont du mal à faire concurrence avec les grosses entreprises françaises ou internationales.                                                                                                                                            Malgré tous les moyens mis en oeuvre par le gouvernement (diverses réformes, mécanisation des moyens de cultiver) pour développer le secteur primaire, celui ci connaîtra une grande baisse à partir des années 60 et cela jusqu’à la fin des Trente Glorieuses notamment du à l’exode rurale. En effet la plupart des agriculteurs habitant les campagnes vont, abandonner leurs terres et se déplacer vers les grandes villes pour trouver du travail dans les usines.                                                                                                                Ainsi, on assiste, vers la fin des Trente Glorieuses à un bouleversement des différents secteurs. Les secteurs primaires et secondaires connaissent une crise (10.1% et 38.6%) alors que le secteur tertiaire connaît une pleine expansion (51.4 %)

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Graphique représentant l’évolution du prix du  pétrole entre les années 1970 et 2000. On remarque alors, la nette hausse du pétrole en 1973 (1er choc pétrolier). En 3 ans (entre 1970 et 1973) le prix du baril de pétrole a augmenter de 7 dollars. Axe des ordonnées : Prix du baril de pétrole ( exprimé en dollars) / Axe des abscisses : Années   

Point de vue sociale

   En revanche, on remarque, durant les Trente Glorieuses, une lutte des classes qui divise la population française. En effet, la classe des ouvriers est très présente (“la classe pour soi” d’après Carl Marx), les grèves sont alors très nombreuses ce qui paralyse l’état comme en mai 1968. l’Etat est donc forcé à agir rapidement en faveur des ouvriers afin d’éviter des crises de sous-consommation en cas de l’insatisfaction des individus.                                         La population française est énormément divisée suite à la présence de diverses inégalités. Ainsi  les chômeurs de longue durée connaissent la pauvreté dans un pays riche. Certaines régions telle que la Lorraine subissent le chômage de plein fouet, ce qui fait reculer l’industrie et creuse les inégalités territoriales déjà très présentes en France.                             En outre, l’immigration, qui jouait un rôle important durant la période des Trente Glorieuse fut suspendue dès le début de 1974. De nombreuses politiques de refoulement des étrangers ont eu lieu. On distingue alors deux situations. D’une part, la situation régulière ou l’Etat va aider financièrement le retour des immigrés dans leur pays respectif. Et d’autre part, les situations irrégulières, concernant des personnes qui ne voulaient pas se faire expulser, au point que l’état décida de mener une lutte contres les clandestins.   Les Trente Glorieuses étant une période où l’état encourageait tout le monde à travailler pour acquérir des biens et favoriser la consommation, on remarque alors une hausse du nombre de femmes travaillant, et plus particulièrement dans le secteur tertiaire (restauration, hôtellerie, secrétariat).

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Photo prise lors des grèves ( puis émeutes) de mai 1968.  Les diverses inégalités sociales conduisaient à des mouvements de foule, ce qui témoignait de la fragilité politique et sociale dans laquelle était plongée la France à cette époque.

Conclusion

   D’un point de vue économique, social et politique, la société de consommation est devenue l’actrice principale des “Trente Glorieuses”. Elle aura permis de donner un nouvel essor à la France qui, en quelques années, s’est imposée comme une puissance européenne et mondiale aux côtés des Etats-Unis.  Cependant, elle aura tendance à privilégier le capital économique et par conséquent, à fragiliser la société, en créant des inégalités de richesse et de puissance sans se soucier de l’environnement.                                                       On peut alors se demander si les crises pétrolières des années 1970 et l’entrée dans une phase de ralentissement de la croissance dès les années 1980 remettent en cause la stabilité de cette société ?

Couverture du livre «  “Décroissance ou décadence”, Vincent Cheynet

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